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Les États-Unis abandonnent leur discours de coopération militaire en Afrique

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L’armée américaine opère un virage stratégique en Afrique : fini le discours sur la bonne gouvernance et la lutte contre les racines des insurrections. Désormais, elle exhorte ses alliés africains à devenir autonomes face aux menaces sécuritaires.
Les États-Unis abandonnent leur discours de coopération militaire en Afrique
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Lors de l’exercice African Lion, le plus grand entraînement militaire conjoint du continent, ce changement de ton a été flagrant. « Nous devons être en mesure d’amener nos partenaires au niveau des opérations indépendantes« , a déclaré le général Michael Langley, chef de l’AFRICOM, dans une interview à l’Associated Press.

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Un nouveau credo : « Partager le fardeau »

Pendant quatre semaines, plus de 40 pays ont simulé des ripostes aux menaces aériennes, terrestres et maritimes. Drones, combats rapprochés, tirs de roquettes guidées par satellite… Les manœuvres restaient similaires aux éditions précédentes. Mais la rhétorique mettant en avant les valeurs américaines (face à la Russie et la Chine) a quasiment disparu.  

« Il faut partager le fardeau », a insisté Langley. Exit les promesses d’approche « globale » mêlant défense, diplomatie et développement. Place à un message pragmatique : les alliés africains doivent se prendre en main. Une priorité affichée de l’administration Trump.  

Washington recentre ses priorités… et réduit son empreinte  

Ce repositionnement s’inscrit dans une stratégie plus large : « protéger la patrie » tout en incitant d’autres pays à gérer les zones d’instabilité. « Nous cherchons à ce que d’autres nations contribuent », a expliqué Langley, évoquant le cas du Soudan.  

Dans le même temps, les États-Unis allègent leur présence militaire en Afrique, où Russes et Chinois étendent leur influence. Pékin forme massivement des armées africaines, tandis que les mercenaires russes de Wagner consolident leur rôle en Afrique du Nord et de l’Ouest.  

L’abandon progressif de l’approche « holistique »  

Il y a un an, Langley défendait encore l’idée d’une « approche gouvernementale globale » contre les insurrections. « La force seule ne peut pas stabiliser les États faibles », martelait-il. La bonne gouvernance était alors présentée comme la « solution durable » face aux menaces climatiques ou terroristes.  

Aujourd’hui, cette vision s’efface – malgré des succès locaux, comme en Côte d’Ivoire, où développement et défense ont réduit les attaques jihadistes. « J’ai vu des progrès et des régressions », concède Langley, qui quittera son poste cette année.

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Des armées africaines fragiles face à des insurgés en expansion

Le retrait américain intervient dans un contexte alarmant : groupes jihadistes et trafics prospèrent, tandis que les armées locales manquent de moyens. « Nous considérons l’Afrique comme l’épicentre d’Al-Qaïda et de l’État islamique », alerte un responsable américain sous anonymat.  

Pourtant, le Pentagone a toujours relégué l’Afrique en bas de ses priorités, malgré des milliards dépensés en aide sécuritaire et 6 500 militaires déployés. Résultat : dans certaines zones, Moscou et Pékin remplacent les Occidentaux. Ailleurs, comme en Somalie, les frappes aériennes américaines ne suffisent pas à compenser les faiblesses des forces locales.  

Sahel et Afrique de l’Ouest : l’engrenage de la violence  

La nouvelle doctrine américaine (moins d’engagement, plus de responsabilisation) arrive alors que la violence déborde des foyers traditionnels. En 2024, plus de la moitié des victimes du terrorisme mondial ont péri dans le Sahel, selon l’Institute for Economics and Peace. La Somalie, elle, concentre 6 % des morts liées au terrorisme.

« L’armée somalienne essaie de trouver sa voie », reconnaît Langley. Même constat en Afrique de l’Ouest : « Les États n’ont pas les capacités pour contrer ces menaces », analyse Beverly Ochieng (Control Risks). Routes impraticables, manque de surveillance aérienne, infrastructures défaillantes… Les obstacles sont immenses.  

Le retrait occidental, un vide comblé par d’autres

Les puissances européennes se retirent progressivement du Sahel, chassées par des juntes hostiles ou par lassitude. Résultat : des régions entières échappent à tout contrôle. « Sans forces aériennes solides, impossible de suivre les mouvements des militants », souligne Ochieng.  

Un désengagement qui contraste avec l’offensive russe et chinoise… et laisse les États africains face à un dilemme : s’adapter ou sombrer.  

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